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Nathanaël est porteur de Trisomie 21, c’est ce qu’il a et ce qu’il n’est pas.

À l’occasion de la journée mondiale de la Trisomie 21, nous avons été à la rencontre de Rachel Restiau et de son fils Nathanaël dans le but de découvrir la Trisomie 21 sous un regard nouveau, humain, touchant, et parental.



Premièrement, qu'est ce que la Trisomie 21 ?

La Trisomie 21, aussi appelée Syndrome de Down, induit la présence d’un chromosome 21 en plus, on parle de chromosome surnuméraire. Le syndrome de Down n’est pas héréditaire. Il est généralement lié à un accident lors de la division cellulaire. Il est également important de souligner qu’il n’existe pas différents degrés de Trisomie mais bien trois types distincts: libre et homogène, en mosaïque ou par translocation.
 
La Trisomie 21 a des conséquences sur l’apparence physique : hypotonie musculaire (une diminution du tonus), hyperlaxité, nez plat, yeux en amandes, cous de petite taille, petites oreilles, petites mains avec un unique pli palmaire et une taille inférieure à la moyenne. Ne négligeons ici pas l’unicité des individus: les caractéristiques sont variables et le patrimoine génétique des parents est à prendre en compte.

Elle mène également à une
déficience intellectuelle très variable selon les individus.

Finalement, elle induit possiblement des complications de santé diverses tels que des malformations cardiaques ou digestives, des dérèglements de la thyroïde, des infections ORL fréquentes, des malformations de l’appareil urinaire, et régulièrement une immunodéficience.

La Trisomie ne se transmet pas et ne se guérit pas. Elle résulte d’une anomalie chromosomique. Elle est un état. 

Rachel Restiau 
n’aime pas l’usage du terme trisomique, elle le trouve réducteur ! Et vous comprendrez vite pourquoi… À travers cette interview, découvrez Rachel; maman, juriste, blogueuse mais aussi pédagogue sur les réseaux sociaux. Au fil de ses contenus, elle espère, via l’information, changer le regard de la société sur les personnes en situation de handicap et sur son fils, Nathanaël.


Interview de Rachel Restiau...



Bonjour Rachel. Parlez-moi de vous. De votre famille. De Nathanaël.
 
" Moi, c'est Rachel, 41 ans, je suis juriste et aussi blogueuse. Je suis l'heureuse maman de 3 enfants : Antonin bientôt 8 ans, Nathanaël qui 5 ans et la petite dernière, Sarah, 16 mois cette semaine. Je suis également la belle maman d'une petite fille de 10 ans que mon conjoint a eu d'une précédente union. Nathanaël nous a fait la surprise de naître avec un chromosome en plus. En effet, nous avons appris, à sa naissance, qu'il était porteur de Trisomie 21. C'est un petit garçon plein de vie qui a littéralement changé nos vies. “
 
Dans un précédent post Instagram, vous écrivez: “Nathanaël est porteur de Trisomie 21, c’est ce qu’il a et ce qu’il n’est pas”. Je trouve cette phrase extrêmement touchante. 
 
“ En effet, je considère que Nathanaël est porteur de Trisomie 21 et que ce n'est qu'une de ses nombreuses facettes. C'est ce qu'il a et non ce qu'il est car il est bien plus qu'un porteur de Trisomie 21. C'est pourquoi je n'aime pas trop le terme "trisomique" qui est un peu réducteur. Nathanaël est en premier lieu un petit garçon de 5 ans plein de vie et de joie, un petit frère et depuis un peu plus d'un an un grand frère aux petits soins. ”
 
Le 22 juin 2016, vous découvriez la Trisomie de votre fils. À la naissance. Quelle a été votre réaction ? Et celle de vos proches ? 
 
“ Nathanaël est né le 22 Juin 2016 (un peu en avance car sa naissance était programmée par césarienne le 24 juin) et, à ce moment-là, nous ignorions complètement sa Trisomie 21 car, lors de la grossesse, aucun examen, aucune analyse, ni même les échographies ne l'ont détecté. Au tri-test (échographe couplé à la prise de sang), j'avais 1/7961 chance d'avoir un petit bonhomme porteur de Trisomie 21. Pourtant dès que je l'ai vu, j'ai su... je ne sais l'expliquer, je pense que c'est l'instinct, sa petite bouille toute ronde et ses yeux en amande. Nous en avons brièvement discuté en salle de réveil avec le papa, Alexandre, qui avait également des doutes… puis on s'est dit qu'on "hallucinait" car le personnel médical ne nous disait rien mais les doutes étaient toujours là dans un coin de notre tête. 
 
Le personnel a été parfait car ils nous ont laissé profiter de cette naissance comme pour n'importe quel enfant. Nous avons appris le lendemain qu'ils avaient également des doutes lorsque la pédiatre a fait la première visite médicale.  Elle nous a expliqué que pour être sûrs, il fallait réaliser une prise de sang. Et nous avons eu les résultats quelques jours plus tard confirmant la Trisomie 21. Tant que nous n'étions pas sûrs, nous n'avons pas osé en parler à nos proches... nous avons attendu d'avoir les résultats pour l'annoncer et c'est le papa qui l'a fait car je n'étais pas en mesure de le faire. La confirmation a été un réel choc pour nous deux. Nos proches ne s'y attendaient évidemment pas... Certains nous ont demandé si nous le savions avant (question très récurrente lorsque l'on évoque la Trisomie 21 de Nathanaël car la majorité des personnes n'arrivent pas à concevoir qu'on ne peut pas toujours le détecter avant la naissance.). Nos familles ont été présentes et ceux dont nous sommes restés proches n'ont jamais eu de jugement sur Nathanaël car c'est un vrai petit rayon de soleil. Pour les amis et collègues, n'ayant pas la force de l'annoncer oralement, j'ai rédigé un petit mot expliquant que Nathanaël était né avec un chromosome d'amour en plus et que j'avais besoin de temps. Cette nouvelle a été très bien accueillie, tout le monde a été bienveillant et cette formulation a beaucoup plu. ”  
 
Pourquoi avoir choisi ce nom, @unchromosomedamourenplus, pour votre compte Instagram ?
 
“ À vrai dire "un chromosome d'amour en plus" fait suite à une petite phrase que j'ai dite à mon conjoint à la maternité lorsque nous attendions les résultats, je lui ai dit que s'il avait une Trisomie 21, après tout c'était un truc en plus (un chromosome) et pas en moins alors c'est peut être parce que l'on s'était beaucoup aimé et qu'on l'aimait déjà beaucoup et que c'était un chromosome d'amour en plus. ” 
 
Sur votre compte Instagram, vous partagez votre histoire. Dans quel but ? Changer le regard de la société ? 
 
“ À notre retour à la maison, je me suis sentie un peu dépassée et j'ai eu très vite envie de partager mon histoire avec d'autres parents, d'autres familles. Et puis c'est peut-être bête à dire, mais j'avais besoin de montrer Nathanaël et sa Trisomie 21. Alors que les premiers jours, j'étais réticente à l’idée de l'annoncer à mes proches par peur des jugements et regards, j'avais par la suite envie de montrer que ce n'était pas si terrible et que oui mon bébé avait une Trisomie 21 mais qu'il était avant tout un joli bébé ! 
 
J’ai créé la page Facebook dans un premier temps. Les retours étaient tellement nombreux. Il y avait tellement de familles, de parents ou futurs parents avec des questions que nous avons eu l'idée avec mon conjoint de créer l'association du même nom. Depuis, il y a eu le compte instagram et le blog.
 
Et oui, je partage mon quotidien de famille presque ordinaire car nous avons ce petit plus mais je souhaite montrer que ce n'est pas insurmontable et que cette différence n'est qu'une parmi tant d'autres car nous sommes tous différents au fond. J'essaie de faire évoluer les mentalités et de faire changer les regards sur le handicap et sur la Trisomie 21, de combattre les préjugés encore nombreux pour informer le public car lorsque les personnes sont informées (bien informées) elles ont moins de craintes. ” 
 
Que diriez-vous à une personne qui, par méconnaissance de la Trisomie 21 , porte un jugement sur votre enfant ?
 
“ À une personne qui porte un jugement sur mon enfant, je lui dirais justement que c'est avant tout un petit garçon et un futur adulte avec des différences comme tout le monde. Que cet enfant est un modèle car, contrairement aux autres, il se moque des différences, et ne portera aucun jugement. Ce qui ne l'empêche pas d'avoir son caractère. ” 
 
Quels conseils donneriez-vous à des nouveaux parents d’un jeune porteur de Trisomie 21 ?
 
“ Aux parents qui apprennent la Trisomie de leur enfant, je leur dirais d'avoir confiance en cet enfant car il leur montrera qu'il est capable de beaucoup de choses, mais d'avoir également confiance en eux. On ne peut imaginer ce dont on est capable pour un enfant avant qu'il vienne au monde. En tant que parents, nous sommes près à déplacer des montagnes. Et surtout, il ne faut pas qu'il n'hésite à en parler, à partager avec d'autres parents, à nous contacter si besoin car c'est normal au début d'être triste, de se poser un milliard de questions et de passer par toutes les émotions. L'arrivée d'un enfant est déjà un grand bouleversement alors quand il est Extra c'est d'autant plus difficile. ”
 
Pouvez-vous me partager des obstacles quotidiens auxquels vous faites face ? Frais de logopédie, scolarisation, loisirs… ?
 
“ Le plus gros des obstacles à mon sens, c'est le côté administratif : les prises en charge, les dossiers MDPH, le fait de devoir sans cesse faire des renouvellements, des modifications de dossiers. Et pour la scolarité : nous sommes chanceux elle se passe à merveille pour Nathanaël mais encore une fois les demandes d'AESH, de maintien et le fait que nous devions, deux ans à l'avance, nous projeter pour savoir s'il doit continuer en milieu ordinaire, en ulis voir en IME est un non-sens. C'est difficile de savoir comment il aura évolué d'ici là, malheureusement les places sont très très limitées et donc il faut s'y prendre en avance sans savoir... ce sont des petites choses qui au cumul peuvent être difficiles à gérer et que l'on ne soupçonne pas lorsque nous n'y sommes pas confrontés. Ensuite, oui, il y a des frais, certains ne sont pas pris en charge et c'est parfois un frein pour les familles tout comme le manque de répit pour les aidants car les rendez-vous médicaux, les bilans et contrôles sont nombreux et très prenants. ” 
 
Que pensez-vous de cette citation «  Se pourrait il que les personnes trisomiques aient un rôle incontournable à jouer, celui de nous ramener à l’essentiel. À ce que nous sommes. À l’être, au don de soi . À la joie. »  ?
 
“ Cette citation est parfaite. Je changerais juste trisomiques en "porteuses de Trisomie 21" mais c'est exactement ce que je ressens depuis la naissance de Nathanaël. Pour moi ces personnes sont des modèles pour la société. Nathanaël a changé nos vies mais en bien meilleures. Son papa s'est occupé de lui en laissant de côté sa carrière professionnelle pour se consacrer à lui et à l'Association et désormais il travaille dans le social et l'associatif alors que c'est aux antipodes de son précédent métier. Pour ma part, Nathanaël m'a permis de revenir à l'essentiel : la famille, l'amour et à me poser... ne pas courir après la perfection, profiter de l'instant présent et apprendre la patience. ” 
 
Quels changements souhaiteriez-vous voir dans la société pour le futur de Nathanaël ?
 
“ Dans le futur j'aimerais une société dans laquelle il y aurait moins de barrières, notamment grâce une simplification des démarches: que ces enfants aillent à l'école sans que cela ne pose de problème administratif pour les recrutements d'AESH etc... que ce soit fluide et normalisé, et que finalement il n'y ait pas de question à se poser... et qu'ils puissent réellement avancer à leur rythme. On se fiche du nombre d'années de maternelle s'ils évoluent bien au final car on sait qu'ils peuvent mettre plus de temps mais qu'ils arrivent à faire de grandes choses. On voit de plus en plus de porteurs de Trisomie 21 dans les médias, les publicités etc et je trouve cela formidable alors j'espère que cela va continuer et que cela ira de soi dans l'avenir, qu'ils seront davantage représentés et que tous les handicaps seront représentés. ” 

Si vous avez aimé découvrir Nathanaël à travers l’interview de sa mère Rachel, je vous conseille de les suivre…
Une interview de Florence Defraire