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Emploi et handicap...

Du nouveau et des exemples par Gisèle Mandaila - Secrétaire d’Etat aux Familles et aux Personnes Handicapées

Comme vous le savez, la priorité du gouvernement est d’améliorer le taux d’emploi de la population.

Cette priorité doit également concerner les personnes handicapées !

Celles-ci constituent selon l’OMS, dans les pays occidentaux, plus de 10 % de la population.

Et, selon les chiffres les plus récents d’Eurostat, le taux d’emploi de la population de l’Union européenne en âge de travailler et qui présente un handicap est de 49 %. Il est de 42 % en Belgique.

Pour favoriser l’emploi des personnes handicapées, tous les experts s’accordent à dire qu’une des mesures à prendre, au niveau fédéral, est le relèvement du taux d’immunisation sur les revenus professionnels afin de permettre à la personne handicapée, qui bénéficie d’une allocation de remplacement de revenus, de pouvoir cumuler une partie significative de celle-ci avec ses revenus professionnels.

En d’autres termes, il s’agit de mettre en place un mécanisme d’activation de l’allocation de remplacement de revenus. Et c’est ce que nous avons fait.

Une deuxième mesure est également recommandée par les experts : Il s’agit de la mise en place de l’ « allocation dormante » qui est un mécanisme visant à garantir à la personne handicapée qu’elle retrouvera rapidement son allocation en cas de perte de son emploi.

La semaine dernière, la Commission européenne a publié son plan d’action 2006-2007 en faveur des personnes handicapées.

Il est intéressant de constater qu’il est largement consacré à l’emploi ; Et je constate que les mesures adoptées par le gouvernement ce matin s’inscrivent parfaitement dans les objectifs visés par ce plan.

La Commission européenne estime que « le piège que constitue le niveau élevé des prestations perçues par rapport à celui des rémunérations et le risque de perdre ces prestations en cas d’embauche sont des facteurs dissuasifs importants ».

Pour rappel, la déclaration de politique fédérale du 11 octobre 2005 prévoit que « le Gouvernement veillera à surmonter les pièges à l’emploi qui persistent dans la réglementation relative aux allocations pour personnes handicapées ».

Je vous propose d’examiner plus en détail les mesures adoptées ce matin par le Gouvernement :

1) La possibilité, en cas d’activité professionnelle, de conserver une partie de l’allocation de remplacement de revenus (ARR), plus importante qu’aujourd’hui .

La réglementation actuelle prévoit déjà cette possibilité mais dans une mesure très faible. En effet, la réglementation prévoit, en cas d’activité professionnelle de la personne handicapée, un taux d’immunisation de 10 % sur les revenus professionnels à prendre en considération pour le calcul de l’allocation de remplacement.

Les 90 % restants viennent donc en déduction de l’allocation à laquelle la personne peut prétendre.

La faiblesse de ce taux est dénoncé comme constituant un piège à l’emploi pour la personne handicapée qui bénéficie d’une allocation. C’est ainsi qu’une personne bénéficiant de l’allocation maximum perdra le droit à cette allocation dès lors qu’elle bénéficie d’un revenu professionnel de 11.127 € par an, qui est pourtant peu important.

En définitive, seules les personnes handicapées qui ont la possibilité et la capacité d’occuper une emploi à temps plein et correctement rémunéré, prennent actuellement le risque de quitter le régime d’allocations. Pour celles qui travaillent à temps partiel, c’est en effet plus difficile car leur revenu professionnel ne permet souvent pas d’augmenter leurs ressources.

C’est pourquoi, sur les 75.000 bénéficiaires d’une allocation de remplacement de revenus, moins de 3.000 personnes ont actuellement un revenu professionnel, soit moins de 4%. Il est donc clair que le système actuel n’encourage pas les personnes handicapées qui bénéficient d’une ARR à se lancer sur le marché de l’emploi.

La réforme adoptée ce matin par le Gouvernement prévoit de remplacer l’abattement actuel de 10 % sur les revenus professionnels par l’abattement progressif suivant :

- 50% pour les revenus professionnels situés entre 0 et 4.000 €
- 25% pour les revenus professionnels qui sont situés entre 4.000 € et 6.000 €.

Avec cette réforme, la personne verra donc ses ressources globales (allocation + revenus professionnels) augmenter en moyenne de 30%.

Exemple :
Monsieur Dupuis, bénéficiant d’une ARR de 5.007,36 € (catégorie A - cohabitant), entame un travail à mi-temps pour lequel il perçoit un revenu professionnel imposable annuel de 6.100, 00 EUR.
Avec le taux actuel (10%), Monsieur Dupuis va perdre son ARR !
Voici le calcul :
* 10 % (taux actuel d’immunisation) de 6.100,00 € = 610,00 €
* Revenus professionnels pris en considération : 6.100,00 € - 610,00 € = 5.490,00 €
* Montant de l’ARR perçue : 5.007, 36 € - 5.490,00 € = - 482, 64 €, soit 0 €

Avec le système actuel, les seules ressources de Monsieur Dupuis sont donc constituées de ses revenus professionnels alors que ceux-ci sont peu importants.

Avec la réforme proposée, Monsieur Dupuis pourra conserver une ARR de 1.407, 11 € qu’il cumulera à ses revenus professionnels.
Voici le calcul :
* 50% pour les revenus en dessous de 4.000,00 EUR = 2.000,00 € ;
* 25% pour les revenus entre 4.001,00 EUR et 6.000,00 EUR = 499, 75 € ;
* Revenus professionnels pris en considération : 6.100,00 € - 2.000,00 € - 499,75 € = 3.600,25 €
* Montant de l’ARR perçue : 5.007, 36 € – 3.600,25 € = 1.407, 11 €

Selon les experts, on estime que cette réforme pourrait, à terme, permettre à 5000 allocataires supplémentaires de rejoindre le monde du travail.

Bien sûr, la réforme ne pourra produire ses effets que progressivement. Si la réforme pouvait, après une année, amener 500 à 1000 personnes sur le marché de l’emploi, ce serait déjà très encourageant. En tout état de cause, il y aura, après une année de mise en oeuvre, une évaluation de cette réforme qui portera à la fois sur le nombre supplémentaire d’allocataires exerçant une activité professionnelle et sur l’impact budgétaire.

Impact budgétaire de la mesure :
Actuellement, le coût annuel de l’abattement de 10% est de 9.337.000 €.
Le coût de l’abattement proposé a été évalué par l’Administration à 12.000.100 €.
L’impact budgétaire de la mesure est donc de 2.663.100 € (12.000.100 € - 9.337.000 €).
Les marges du budget relatif aux allocations pour personnes handicapées sont largement suffisantes pour financer la mesure (le budget total est de 1.507 millions € pour 2006).
Il faut par ailleurs prendre en considération l’ « effet retour » de la mesure. Pour chaque allocataire qui décidera de se lancer sur le marché de l’emploi, il y aura une réduction des dépenses correspondant à la différence entre l’allocation complète et l’allocation réduite sur base des nouveaux taux.

Dans l’hypothèse où 1.000 allocataires supplémentaires (hypothèse d’un travail à 1/3 temps au revenu minimum garanti) décident de rejoindre le monde du travail, la mesure sera entièrement compensée par l’ « effet retour » de la mesure.

2) L’accélération du calcul des allocations en cas de cumul avec un revenu professionnel

Actuellement, lorsque la personne en situation de handicap débute une activité professionnelle, son allocation de remplacement de revenus est maintenue jusqu’à ce que l’Administration dispose de l’avertissement extrait de rôle établissant le montant des revenus perçus dans le cadre de cette activité.

Il faut ainsi parfois près de deux ans pour calculer l’abattement lié aux revenus professionnels !

Et pendant cette période, l’allocataire cumule l’intégralité de ses allocations et de ses revenus professionnels.

De trop nombreuses personnes se voient réclamer le remboursement des allocations indûment perçues pendant plusieurs mois (de 6 à 24 mois).

Il est vrai que, dans la grande majorité des cas, la Commission d’aide sociale, saisie par l’allocataire, propose au Ministre de renoncer à la récupération. Mais cette situation provoque une insécurité juridique pour les allocataires. Sans compter que certains allocataires n’introduisent pas de recours…

Pour remédier à cette situation, le calcul de l’abattement se fera dorénavant sur base d’une attestation patronale précisant le montant de la rémunération et sera effectué dans un délai de 6 mois à dater du début de l’activité professionnelle.

Durant au moins trois mois et au plus tard, jusqu’à ce que la décision fixant le nouveau montant de son allocation lui soit notifiée, la personne handicapée pourra cumuler l’intégralité de ses allocations et des revenus professionnels.

Au terme de cette période, la personne handicapée recevra son allocation de remplacement de revenus, calculée sur base des nouveaux taux d’immunisation.

L’Administration aura la possibilité de vérifier, sur base des données fiscales qui lui seront transmises ultérieurement, si les revenus professionnels, déterminés selon cette nouvelle procédure, correspondent à ceux réellement perçus.

3) L’allocation dormante
Le Gouvernement a par ailleurs accepté le principe d’une seconde réforme importante visant à lever un autre piège à l’emploi que comporte la réglementation.

En effet, actuellement, lorsque la personne handicapée perd son emploi et qu’elle a travaillé plus de 3 mois, elle doit à nouveau suivre toute la procédure pour retrouver son allocation.

Le mécanisme de « l’allocation dormante » permet à l’allocataire ne pouvant prétendre aux allocations de chômage ou aux indemnités de maladie après une période de travail, de recouvrer rapidement son allocation de remplacement de revenus, sans devoir suivre la procédure applicable aux nouvelles demandes.

Ce mécanisme entrera en vigueur au même moment que les deux projets d’arrêtés royaux joints à la présente note.

Je vous remercie pour votre attention.
Gisèle Mandaila - Secrétaire d’Etat aux Familles et aux Personnes Handicapées