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Droits à l'interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales

Le Parlement européen a adopté, ce 16/06/2010, une résolution législative sur le projet de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux droits à l'interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales.



Le Parlement a arrêté sa position en première lecture suivant la procédure législative ordinaire (l’ex-procédure de codécision). Les amendements adoptés en plénière sont le résultat d’un compromis négocié entre le Parlement européen et le Conseil. Ils modifient la proposition de la Commission comme suit :

Référence à la Charte des droits fondamentaux et à la CEDH : le projet de directive devrait clairement faire référence à la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) afin de renforcer, au sein de l'Union européenne, les normes minimales en matière de droit à un procès équitable. Dans ce contexte de fixation de règles minimales, les États membres devraient pouvoir étendre les droits prévus afin d'assurer un niveau de protection plus élevé dans des situations qui ne sont pas explicitement traitées dans la directive. Le niveau de protection ne devrait toutefois jamais être inférieur aux normes prévues par la CEDH ou la Charte des droits fondamentaux, telles qu'elles sont interprétées dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme ou de la Cour de justice européenne.

Feuille de route visant à renforcer les droits procéduraux des suspects ou des personnes poursuivies : le projet de directive devrait également faire référence à la Feuille de route visant à renforcer les droits procéduraux des suspects ou des personnes poursuivies dans le cadre des procédures pénales qui demande, par une démarche progressive, l'adoption de mesures relatives au droit de traduction et d'interprétation (mesure A), au droit aux informations relatives aux droits et à l'accusation (mesure B), au droit à l'assistance d'un conseiller juridique et à une aide juridictionnelle (mesure C), au droit à la communication avec les proches, les employeurs et les autorités consulaires (mesure D) et au droit à des garanties particulières pour les suspects ou personnes poursuivies qui sont vulnérables (mesure E). La présente directive porterait uniquement sur la mesure A et établira des normes communes minimales à appliquer dans les domaines de l’interprétation et de la traduction dans le cadre des procédures pénales.

Champ d'application : des dispositions nouvelles sont introduites concernant les infractions mineures (de type infractions de la route). Il est stipulé que lorsque le droit d'un État membre prévoit, pour ce type d’infractions, l'imposition d'une sanction par une autorité autre qu'une juridiction compétente en matière pénale et que la sanction peut faire l'objet d'un recours devant cette juridiction, la directive ne devrait s'appliquer qu'à la procédure de recours devant cette juridiction.

Il est également précisé que la directive ne devrait pas porter atteinte aux dispositions du droit national concernant la présence d'un conseiller juridique (avocat) à tout stade de la procédure pénale ni aux dispositions du droit national concernant le droit d'accès d'un suspect ou d'une personne poursuivie aux documents de la procédure pénale.

Droit à l'interprétation : les États membres devraient veiller à la mise en place d'un mécanisme permettant de vérifier si le suspect ou la personne poursuivie comprend et parle la langue de la procédure pénale et s'il ou elle a besoin de l'assistance d'un interprète. Dans l’affirmative, ils devraient veiller à ce que le suspect ou la personne poursuivie se voie offrir sans délai l'assistance d'un interprète.

L'interprétation devrait être d'une qualité suffisante pour garantir l'équité de la procédure, notamment en veillant à ce que le suspect ou la personne poursuivie soit informé des faits qui lui sont reprochés et soit en mesure d'exercer son droit à se défendre. Si nécessaire, les États membres devraient également veiller à assurer que les services d'un interprète soient mis à disposition pour la communication entre le suspect ou la personne poursuivie et son conseiller juridique en liaison directe avec tout interrogatoire ou toute audience pendant la procédure, ou en cas de recours ou d'autres demandes dans le cadre de la procédure. Le suspect ou la personne poursuivie devrait notamment être en mesure d'expliquer à son avocat sa version des faits, de signaler toute déclaration avec laquelle il ou elle est en désaccord et de porter à la connaissance de son avocat tout fait qui devrait être invoqué pour sa défense.

Le droit à l’interprétation comprendrait également l’assistance apportée aux personnes présentant des troubles de l’audition ou de la parole.

Les États membres devraient également veiller à ce que le suspect ou la personne poursuivie ait le droit de contester la décision concluant à l'inutilité de recourir à un service d'interprétation et, ou de se plaindre d'une qualité d'interprétation insuffisante pour garantir l'équité de la procédure. Au besoin, il est également prévu qu’il soit possible de recourir à des moyens techniques tels que la visioconférence ou la communication par téléphone ou par l'internet, sauf si la présence physique de l'interprète est requise pour garantir l'équité de la procédure.

Droit à la traduction des documents essentiels : il est prévu que les États membres veillent à ce que le suspect ou la personne poursuivie qui ne comprendrait pas la langue de la procédure pénale bénéficie, dans un délai raisonnable, de la traduction écrite de tous les documents essentiels pour lui permettre d'exercer son droit de se défendre. Parmi ces documents essentiels figurent les décisions privant une personne de sa liberté, l'acte d'accusation et tout jugement. Les autorités compétentes décideraient au cas par cas si d'autres documents sont essentiels. Les passages des documents essentiels qui ne présenteraient pas d'intérêt pour le suspect ne devraient pas forcément être traduits.

De la même façon que pour l’interprétation, les États membres devraient veiller à ce que la traduction prévue soit d'une qualité suffisante et que les suspects puissent contester la décision concluant à l'inutilité de traduire certains documents ou passages de documents, ou de se plaindre de la qualité de traduction. Une traduction orale pourrait suffire dans certains cas, à condition que cette traduction orale ou ce résumé oral ne porte pas atteinte à l'équité de la procédure. En cas de renonciation au droit à la traduction des documents essentiels, le suspect devrait être informé des conséquences de cette renonciation et celle-ci devrait être sans équivoque et formulée de plein gré.

Qualité de la traduction : afin de disposer de services d'interprétation et de traduction adéquats et de faciliter un accès aisé à ceux-ci, les États membres devraient tâcher de dresser un ou plusieurs fichiers de traducteurs et d'interprètes indépendants possédant les qualifications requises. Une fois dressés, ces fichiers devraient être mis à la disposition des conseillers juridiques et des autorités compétentes. Les interprètes et traducteurs concernés devraient respecter la confidentialité de l'interprétation et des traductions fournies au titre de la directive.

Formation : de nouvelles dispositions sont prévues afin que les États membres demandent aux personnes chargées de la formation des juges, des procureurs et du personnel de justice intervenant dans les procédures pénales, d’accorder une attention particulière aux spécificités de la communication avec l’assistance d’un interprète, afin d’assurer une communication efficace et effective.

Procédure de consignation : de nouvelles dispositions sont également prévues pour que les États membres veillent à ce que, lorsque les interrogatoires d'un suspect ou d'une personne poursuivie sont menés par l'autorité chargée de l'instruction ou l'autorité judiciaire avec l'aide d'un interprète et lorsqu'une traduction orale ou un résumé oral de documents essentiels est fourni en présence de cette autorité, ou en cas de renonciation de la personne à ses droits à la traduction, l'existence de ces faits soit dûment consignée.

Rapport et entrée en vigueur : il est prévu que la Commission présente au Parlement européen et au Conseil, un rapport visant à déterminer dans quelle mesure les États membres ont pris les dispositions nécessaires pour se conformer à la directive dans un délai de 4 ans après la publication de la directive au Journal Officiel de l’UE (JO). Les États membres devraient se conformer à la directive dans un délai de 3 ans après la publication de la directive au JO.

Dispositions territoriales : le Royaume-Uni et l'Irlande participeraient à l'adoption et à l'application de la directive mais le Danemark n’y participerait pas et ne serait donc pas lié par celle-ci ni soumis à son application.