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Dégradation dans un home

QUESTION ORALE DE MME MAUEL À MME MORREALE, MINISTRE DE L’ACTION SOCIALE SUR « LES DÉGRADATIONS COMMISES PAR DES PERSONNES FRAGILISÉES PAR UN HANDICAP OU PAR DES TROUBLES MENTAUX »

15/12/2020

Mme Mauel (MR). – Madame la Ministre, de nombreux acteurs publics confrontés à des personnes fragilisées par un handicap ou souffrant de troubles mentaux, comme des troubles psychiatriques et cognitifs, déplorent des dégradations commises par lesdites personnes.

À titre d’exemple, j’ai été interpellée par la directrice-gérante du home waremmien qui me fait part de son impossibilité d’action face à ce type de dégradations. En effet, chez les personnes en grande souffrance, l’habitat est souvent le reflet de ce mal-être. 

Les services œuvrant dans le domaine du handicap et de la santé mentale sont confrontés au respect de leur déontologie et de leurs missions. Sans accord de la personne, il est impossible de mettre en place des accompagnements.

De plus, la privation de liberté des personnes en question ne peut se faire qu’en cas de danger imminent et amène à des mises en observation de 40 jours dans les cas les plus graves. Si c’est fait, les personnes mises sous médication de force retrouvent un semblant de stabilité puis sont relâchées sans suivi adéquat.

Les administrateurs de biens tentent de cadrer ces personnes ou se contentent de payer les factures inhérentes aux réparations faute de moyens d’action en rappelant que leurs missions ne consistent ni à éduquer ni à obliger de se soigner.

Quelles solutions proposez-vous afin de répondre aux besoins de ces acteurs publics tout en répondant au besoin d’accompagnement du type de public décrit ?

Quels moyens peuvent-ils être donnés aux institutions publiques concernant les accompagnements « contraints » ?

Est-il possible de mettre en place un système où des travailleurs éducatifs seraient chargés de passer dans les structures occupées par le public dont il est question afin d’éviter ou de pallier les désagréments ?

  1. le Président. – La parole est à Mme la Ministre Morreale.

Mme Morreale, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale, de l’Égalité des chances et des Droits des femmes. – Madame la Députée, j’ai pris connaissance avec attention de votre question. Le sujet est d’importance, mais également sensible.

En préambule, je dirais qu’il faut être attentif à ne pas laisser entendre que les personnes souffrant de handicaps mentaux ou physiques nécessiteraient systématiquement un encadrement par des travailleurs éducatifs pour éviter ou pallier les dégradations de leur logement parce que la classification des personnes est souvent stigmatisante et généralisante.

Je ne veux pas minimiser les difficultés que peuvent éprouver les gestionnaires des sociétés de logement public. Vous avez pris le soin de dire que c’est un témoignage qui vous revient d’une direction.

Il me semble nécessaire de rappeler que leurs missions, décrites dans le Code wallon de l’habitat durable, consistent notamment à gérer et louer des logements aux personnes les plus précarisées et aux revenus moyens, à accueillir et informer les candidats locataires et locataires pour leur offrir un accompagnement social si nécessaire.

S’il convient de se garder d’établir une corrélation entre précarité et troubles de santé mentale, force est de constater que les troubles de santé mentale et la souffrance psychique peuvent y conduire.

Si les problèmes de santé mentale ne se limitent pas au comportement dans le logement, c’est en effet dans celui-ci que souvent les signes de détresse se manifestent. C’est là que se déclenchent les situations d’urgence, impliquant les voisins, les bailleurs, les services sociaux et les services spécialisés.

Lorsqu’une personne présente des troubles de cette nature, cela peut effectivement se traduire par des difficultés dans son logement et l’environnement de celui-ci en termes d’entretien, de dégradations, de comportements inappropriés, de nuisances sonores ou encore de troubles de voisinage, qui peuvent être à l’origine de conflits et de plaintes.

La problématique que vous évoquez se traduit sur le terrain par des situations concrètes à la fois complexes et sensibles. Cette complexité de situations renvoie à leur caractère multifactoriel, comme le cumul d’une souffrance médicale, sociale et psychologique qui sont indissociables.

Les causes de cette souffrance peuvent être multiples. Je pense notamment aux conditions de vie, à la situation économique et sociale et à des causes qui peuvent être intrinsèques à la personne.

Les situations que vous évoquez dépassent probablement le cadre d’action des équipes sociales des sociétés de logements de service public, mais le fait est qu’il leur appartient de mettre en place, si ce n’est déjà fait, des partenariats et des collaborations avec des services spécialisés compétents. Même s’ils sont souvent compétents comme des assistants sociaux, ce sont des généralistes. Il faut donc qu’ils recourent aussi aux services spécialisés en santé mentale.

Vous évoquez enfin les accompagnements contraints. La loi du 26 juin 1990, qui a remplacé l’ancienne loi sur la colocation, a été conçue dans la lignée des principes de la Convention européenne des droits de l’homme. Elle rappelle que le malade est un sujet de droit et vise dès lors la protection de la personne.

Pour répondre à votre question, notons que la mobilité des soins de santé mentale, avec une meilleure articulation de soins de première ligne et l’ensemble des acteurs, que nous avons conclue et renforcée notamment dans le cadre de cette crise, permettra à l’avenir une diminution de la pression tant sur les opérateurs de logement que de la personne elle-même, sans oublier son entourage.

C’est le travail auquel s’attellent les politiques de santé mentale développées par le Gouvernement fédéral en partenariat avec les entités fédérées, notamment dans son volet « Adultes » pour la partie nommée

« Réforme 107 », via les équipes de traitement à domicile et les équipes de réhabilitation qui travaillent à la réinsertion et à l’inclusion sociale.

Une collègue, qui a exercé les responsabilités avant moi, me disait que, en matière de santé mentale, l’important était aussi d’aller vers un public qui était le plus fragilisé et le plus éloigné. Un des constats est que, par exemple, quand on développe ou que l’on renforce les services de santé mentale, des personnes viennent vers ces services, un public important, mais il faut que l’on n’oublie pas tous ceux vers qui on doit aller. Ce public n’était pas totalement pris en considération. Il y a donc un travail qui se fait pour le moment pour aller vers les personnes les plus vulnérables et les plus précarisées. De ce point de vue, vous exprimer, soit via vos témoignages, soit via l’expérience de Mme Greoli, à quel point c’est important de travailler en ce sens. 

J’espère dès lors que les décisions que nous avons prises récemment et que nous devrons encore prendre en collaboration avec le Fédéral iront en ce sens. En tout cas, je rapporterai vos demandes et j’essaierai de les exprimer pour que cela converge.

Mme Mauel (MR). – Je peux aussi en témoigner, car j’ai été moi-même directrice-gérante d’une société de logements de service public et je n’ai jamais rencontré ces cas. C’est la preuve que ce sont des situations un peu cachées, difficiles, complexes et problématiques.

Il convient d’aider et d’accompagner ces personnes troublées, mais aussi épauler, dans ce cas-ci, le Home waremmien et d’autres SLSP qui rencontrent ces situations dans leurs missions. Ils ont des assistants sociaux, mais ils doivent créer des liens et activer des réseaux pour trouver des personnes qui prennent en charge ce public cible pour éviter dans le futur ces situations de désagréments qui pourraient être évitées par une bonne prise en charge des personnes et un accompagnement dans le temps.